L’assemblée publique citoyenne tenue ce jeudi 26 avril à Montmagny est l’occasion de mettre les pendules à l’heure sur la place du gaz naturel dans la transition énergétique, localement mais aussi à la grandeur du Québec. Le comité organisateur, Montmagny en transition, suggère que les subventions gouvernementales fédérales et provinciales de 38 M$ qui pourraient être octroyées pour financer la desserte de gaz naturel jusqu’à Montmagny servent plutôt à aider toutes les entreprises de la MRC à réduire leur utilisation des hydrocarbures en consommant moins d’énergie et en ayant recours à des sources d’énergie renouvelables et locales.

Le projet de desserte en gaz naturel, qui vise à réduire les coûts des leaders économiques de la MRC à court terme, est présenté à tort comme une manière de réduire les gaz à effet de serre (GES), du fait que le gaz naturel est moins émetteur de GES à la combustion que le propane et le mazout. Les données scientifiques indiquent toutefois qu’il en est tout autrement sur son cycle de vie complet, du puits au site, où le gaz naturel ne fait pas meilleure figure que les carburants utilisés actuellement par les entreprises.

«Par son aspect incolore et sa forme gazeuse, le méthane passe souvent inaperçu mais il suffit d’en laisser échapper une infime partie, peu importe où et quand, pour que le gaz naturel perde tout avantage. Pourquoi? Parce que son potentiel de réchauffement planétaire est des dizaines de fois plus important que le CO2» explique Marc Brullemans, biophysicien membre duCollectif scientifique sur la question du gaz de schiste.

Selon Carole Dupuis, coordonnatrice générale et porte-parole du RVHQ, il faut se poser plusieurs questions avant d’appuyer un projet d’expansion du gaz naturel : Ce combustible fossile servira-t-il à des usages auxquels les énergies renouvelables conviendraient tout aussi bien ? Si le gaz semble attrayant financièrement, est-ce parce qu’il est subventionné ? Pourrait-on mieux utiliser les fonds publics pour soutenir les entreprises de Montmagny ? Est-il possible que, dans quelques années, les entreprises clientes regrettent ce choix ? «C’est triste de voir une compagnie comme Gaz Métro, maintenant Énergir, qui a un quasi-monopole sur la distribution de gaz au Québec, se développer aux crochets de l’État en martelant un mythe scientifique», a-t-elle déploré.

Depuis le 8 février 2018, par le biais d’un registre en ligne, le CLD et la MRC de Montmagny incitent la population à appuyer le projet de prolongement du réseau de gaz naturel de Saint-Henri-de-Lévis jusqu’à Montmagny, un tronçon de 80 kilomètres dont le coût s’élèverait à 44 M$, assumé à 86 % par des fonds publics, dont une partie du Fonds vert. La MRC n’a pas jugé pertinent d’organiser une assemblée publique d’information, demandée par deux groupes de citoyens, se contentant de vanter les avantages attendus du projet, sans les démontrer, et de faire la promotion du gaz naturel, sans préciser que le gaz utilisé aujourd’hui est du gaz de schiste issu de la fracturation.

L’assemblée citoyenne intitulée «Le gaz naturel à Montmagny : occasion ou piège ?» est organisée en vue de permettre à la population, aux entrepreneurs et aux élus de se faire une meilleure idée des enjeux entourant le recours à cette source d’énergie dont le bilan environnemental ne présente pas d’avantagesen relation avec les changements climatiques. Un tel projetengagerait le milieu — jusqu’à 95 entreprises industrielles et agricoles — à consommer des hydrocarbures fossiles pour des décennies et leur ferait potentiellement rater le virage énergétique dont leur survie pourrait dépendre à assez court terme. 

Selon Christian Simard de Nature Québec, «on ne peut prétendre que la seule alternative au propane et au mazout dans l’industrie est le gaz naturel. Il y a bien sûr l’électricité et, pour des besoins spécifiques au niveau de la production de chaleur, on peut très bien utiliser la biomasse forestière résiduelle qui est une énergie renouvelable et qui crée des emplois à l’échelle régionale.»

Visionnaire et engagée dans son milieu, Denise Laprise souhaite une prise de conscience des influenceurs : «À l’instar d’une centaine d’initiatives appelées “villes en transition” dans une vingtaine de pays, Montmagny en transition invite les leaders du milieu magnymontois à préparer un mode de vie beaucoup plus indépendant des énergies fossiles. Nous souhaitons que nos gouvernements, nos élus, nos entrepreneurs et la population adhèrent à ce mouvement en faisant un virage tangible et mesurable vers un développement économique et social local favorisant les économies d’énergie et les énergies renouvelables, le recyclage, les modes de transport collectifs et individuels faibles en carbone, les cultures biologiques… L’avenir des communautés pointe dans cette direction, sachant que le développement actuel n’est pas soutenable pour l’environnement.»