Commentaires de Montmagny en transition déposés à la Régie de l’énergie sur le prolongement du gazoduc jusqu’à Montmagny
Montmagny, le vendredi 29 novembre 2019 — Le projet d’extension du gazoduc d’Énergir jusqu’à Montmagny ne devrait pas être autorisé par la Régie de l’énergie, si on considère son coût très élevé en fonds publics, son faible — et toujours discutable — gain environnemental et sa viabilité incertaine sur une période de moins de 40 ans. C’est la conclusion à laquelle arrive Montmagny en transition dans les commentaires que le comité de citoyens vient de déposer à la Régie de l’énergie dans le cadre des audiences sur le projet d’Énergir.
À la lumière des renseignements rendus publics par la Régie le 22 octobre, et en comparant ces données avec deux autres projets de gazoducs analysés antérieurement — Thetford Mines (2012) et Bellechasse (2015) —, on voit que le contexte du prolongement jusqu’à Montmagny ne permet ou ne justifie plus de soutenir ce type d’infrastructure. Pourquoi ?
1) Fonds publics à la hausse : par kilomètre de conduite, le projet de Montmagny affiche un coût en forte croissance, requérant une subvention de 0,60 M$ par kilomètre, contre 0,22 M$ pour Thetford Mines et 0,46 M$ pour Bellechasse, pour un kilométrage semblable et des volumes décroissants.
2) Réduction des GES moindre, ou nulle : le projet de Montmagny montre un bilan de réduction des GES moindre que les autres projets, montrant que les volumes et le type d’énergie déplacée n’apportent pas de grands avantages environnementaux. Mais si on considère les GES en amont et le type de gaz naturel approvisionné (issu de la fracturation en grande partie), on peut affirmer qu’il n’y aura aucune amélioration sur le réchauffement planétaire en recourant au gaz naturel.
3) Viabilité incertaine : avec l’objectif de la carboneutralité en 2050, l’infrastructure ne devrait plus être utilisée en-deçà de 2050, alors que sa viabilité est établie sur 40 ans, ce qui nous mène en 2060. On sait par ailleurs que la tarification du carbone à la hausse rendra la ressource moins attrayante économiquement, et les clients migreront plus tôt que tard vers des énergies à zéro émission nette plus compétitives, rendant obsolète le gazoduc avant son terme théorique.
Fait important, et pour une première fois, le projet sera évalué par la Régie de l’énergie sur la base des clients qui se sont engagés en date du dépôt du projet, plutôt que sur le potentiel sur cinq ans, ce qui rend le volume de ces plus gros clients décisif dans l’analyse, car ce sont leurs besoins qui justifient les projets.
4 millions $ de fonds publics pour raccorder chacun des 10 plus gros clients
Ce n’est pas anodin : quand on examine le détail des volumes des 22 clients sous contrat, on voit que 10 clients consommeraient jusqu’à 85,5 % du volume signé. On comprend que le projet subventionné à hauteur de 47,6 M$ par le gouvernement du Québec est fait sur mesure pour cette dizaine de clients, qui seront donc raccordés au tuyau de gaz naturel grâce à un investissement de fonds publics de 4 millions $ chacun, en moyenne. Les 88 autres clients (signés ou potentiels) sont toutefois nécessaires pour rentabiliser l’infrastructure mais n’auront pas les mêmes avantages tarifaires.
Les fonds publics doivent servir à la transition et non aux énergies fossiles
«Voilà beaucoup de chiffres pour dire que ces millions d’argent public seraient bien mieux investis auprès d’un plus grand nombre d’entreprises, d’organisations, de municipalités du territoire afin qu’elles se départissent des hydrocarbures fossiles dès maintenant. L’atteinte des cibles nationales et mondiales de réduction des GES est encore à notre portée, mais pour très peu de temps. C’est maintenant qu’il faut poser les gestes, et la précarité économique, sociale et environnementale causée par les changements climatiques sera bien plus à conséquence sur nos vies que le coût de l’énergie», plaide Anne-Marie Berthiaume, qui a coordonné la rédaction de ces commentaires déposés à la Régie de l’énergie.